OUTILS POUR PASSER À L’ACTION
Pratiques clés pour un retour au travail réussi et durable
Légende: Recommandation de notre expert
Conseillère experte:
Marie-Michelle GOUIN, professeure adjointe en gestion des ressources humaines, Université de Sherbrooke
Rédacteurs:
Rachèle HÉBERT, professionnelle de recherche, Université de Sherbrooke
France ST-HILAIRE, professeure agrégée en gestion des ressources humaines, Université de Sherbrooke
Marie-Eve MAJOR, professeure agrégée en ergonomie, Faculté des sciences de l’activité physique, Université de Sherbrooke
Rébecca LEFEBVRE, professionnelle de recherche, Université de Sherbrooke Étienne FOUQUET, auxiliaire de recherche, Université de Sherbrooke
Cette initiative a été rendue possible grâce à une collaboration avec l’Université de Sherbrooke.
Retourner au travail après une lésion ou une maladie professionnelle pose de nombreux défis à la fois pour les organisations et les salariés. Le coordonnateur du retour au travail jouerait un rôle particulièrement important pour un retour au travail réussi et durable. Mais que devrait-il faire concrètement pour y parvenir?
Nous avons interprété l’étude publiée en 2017 par Durand et ses collègues qui a été menée auprès de grandes organisations du Québec, au Canada. Ces auteurs avaient pour objectifs 1) de relever les tâches et les activités des coordonnateurs lors du retour au travail d’incapacité prolongée et 2) d’examiner certaines caractéristiques des organisations ou des coordonnateurs qui influencent leurs pratiques de retour au travail pour des cas de lésions ou de maladies professionnelles.
Qu’entend-on par :
Retour au travail
Un salarié est considéré en retour au travail lorsqu’il reprend des tâches de travail à la suite d’une incapacité causée par une blessure ou une maladie. Plus l’absence se prolonge dans le temps, plus le retour au travail sera complexe.
Incapacité prolongée
On qualifie de prolongée l’incapacité de travailler qui perdure au-delà du délai généralement requis pour la guérison d’un problème de santé; habituellement plus de douze semaines pour les troubles musculo-squelettiques et plus de six mois pour problème de santé psychologique.
Coordonnateur du retour au travail
Le rôle du coordonnateur du retour au travail est assuré par un professionnel pouvant occuper diverses fonctions au sein d’une organisation (p. ex. : manager ou professionnel en ressources humaines, médecin ou infirmière du travail) ou à l’externe (p. ex. : conseiller en réadaptation pour un assureur). Le coordonnateur :
- facilite le retour au travail d’un salarié en situation d’incapacité en raison d’une maladie ou d’une blessure;
- travaille en collaboration avec les différentes parties prenantes au retour au travail (p. ex. : salarié, manager, assureur, conseiller d’indemnisation, professionnels de la santé, syndicat et collaborateurs du salarié).
Que révèlent les résultats de l’étude?
4 compétences clés et des actions ciblées pour un retour au travail réussi et durable.
Les auteurs ont regroupé 49 tâches et activités du coordonnateur du retour au travail en 4 compétences clés.
COMPÉTENCE 1 |
Adapter ses pratiques aux besoins et aux capacités du salarié absent et au processus de retour au travail. |
COMPÉTENCE 2 |
Mettre à contribution les parties prenantes du milieu de travail et les ressources externes appropriées lors du processus de retour au travail. |
COMPÉTENCE 3 |
Développer des pratiques qui cadrent avec les lois, règlements, conventions et procédures en lien avec les absences et le retour au travail. |
COMPÉTENCE 4 |
Revoir ou s’interroger sur ses pratiques et conceptions à l’égard des absences et de la santé au travail, et convier les parties prenantes du milieu de travail à en faire autant. |
Des 49 tâches réalisées par les coordonnateurs, 4 tâches sont principalement reconnues comme des pratiques qui favorisent un retour au travail réussi et durable. Celles-ci sont présentées dans le tableau qui suit.
Méthode
Profil des participants
- 327 coordonnateurs invités par courrier électronique.
- 195 questionnaires complétés en ligne.
- Hommes 23,3 % / Femmes 76,7 %.
- Entre 35 et 54 ans (64,2 %).
- Organisations privées et publiques au Québec.
- Organisations de 500 salariés ou plus.
Le questionnaire en ligne s’adressait aux responsables de la gestion des incapacités et aux coordonnateurs du retour au travail.
Tâche et activité favorisantun retour au travailréussi et durable |
Précision |
Piste d’explication |
Exemple d’action |
1) Maintenir une communication avec le salarié absent. (Compétence 1)
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2) Examiner les facteurs de l’environnement de travail qui pourraient entraver le retour au travail.
(Compétence 1)
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3) Planifier le retour au travail (ensemble de tâches). (Compétences 1 et 2)
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4) Appliquer les lois, politiques et règlements sur les absences et le retour au travail. (Compétence 3)
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Parce qu’il faut toujours interpréter une étude avec prudence
Les participants de l’étude étant tous volontaires, il est possible que ces derniers soient plus engagés dans leur travail, ce qui pourrait avoir influencé le type de compétences et les tâches et activités.
L’étude a été réalisée auprès de grandes organisations québécoises et certaines différences pourraient exister avec d’autres organisations (p. ex. : petites ou moyennes) et d’autres pays.
Pistes d’action pour les employeurs
Miser sur des actions et des tâches qui correspondent à de bonnes pratiques pour un retour au travail réussi et durable.
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Miser sur la formation antérieure et le profil des coordonnateurs responsables du retour au travail.
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Profil des coordonnateurs qui favorise les pratiques de retour au travail souhaitées dans une organisation :
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Réponse d’expert
Les tâches et activités interprétées dans cette étude proviennent seulement de trois des quatre compétences clés. Pourquoi? La quatrième compétence réfère plutôt à des activités globales de santé et sécurité au travail (p. ex. : rester informé sur le sujet, implanter des mesures de prévention). Revoir ses pratiques et conceptions à l’égard du retour au travail, et convier les parties prenantes à en faire autant reste essentiel pour favoriser un retour au travail réussi et durable. |
Entrer en communication rapidement avec la personne malade ou blessée peut-il être perçu comme « de l’acharnement »? Généralement, le fait de rester en communication avec votre salarié absent est perçu comme une forme de soutien. Il est toutefois important de tenir compte du contexte de l’absence : il est habituellement recommandé de respecter une période de rétablissement, particulièrement lorsque le salarié est atteint de problème de santé psychologique (p. ex. : dépression). |
Comment peut-on identifier les obstacles au retour au travail? Les obstacles au retour au travail peuvent être identifiés dans le cadre d’observations en milieu de travail ou en discutant avec les diverses parties prenantes. Par exemple, le salarié peut partager certains obstacles au retour au travail. Il peut également être opportun de vérifier si le salarié a le sentiment de pouvoir les surmonter. |
Dans les écrits, « l’action concertée » ou la « coopération » des parties prenantes sont souvent mentionnées comme des éléments importants pour le succès du retour au travail. Pourquoi? Lors de la planification du retour au travail (et même avant), de nombreuses décisions sont prises entre les parties prenantes. Ces dernières seraient particulièrement importantes pour le succès du retour au travail. Tous devraient s’accorder sur les points suivants : 1) le poste où aura lieu le retour au travail; 2) un plan de retour au travail explicitant les tâches dont les exigences correspondent aux capacités du salarié tout au long du processus de retour au travail; et 3) les solutions à mettre en place en cas de problèmes lors du processus de retour au travail. |
De quelle manière les organisations peuvent-elles bénéficier d’une procédure formelle encadrant les retours au travail? Lorsque connue et reconnue, une telle procédure peut favoriser le retour au travail en : 1) formalisant le processus; 2) clarifiant ainsi les procédures à suivre; 3) précisant le rôle et les responsabilités des différentes parties prenantes. |
L’interprétation et les pistes d’actions sont basées sur les travaux des chercheurs suivants :
Corbière, M. et al., 2017. Validation du questionnaire Obstacles au Retour au Travail Et Sentiment d’Efficacité pour les Surmonter (ORTESES) auprès de travailleurs avec un trouble mental courant ou un trouble musculosquelettique. Montréal : IRSST, R-938.
Coutu, M.-F. et al., 2015. Programme de prise de décision entre l’ergothérapeute et le travailleur ayant une incapacité due à un trouble musculosquelettique persistant: Perspective des acteurs en réadaptation. Montréal: IRSST, R-896.
Gouin, M.-M., Coutu, M.-F., Durand, M.-J. 2017. Return-to-work success despite conflicts: an exploration of decision-making during a work rehabilitation program. Disability and rehabilitation. 1-11.
Nastasia, I. et al., 2017. Pratiques des milieux de travail pour assurer un retour en emploi sain et durable. Montréal : IRSST, R-983.
Deux guides complets pour vous accompagner et vous soutenir dans votre démarche de retour au travail afin de faciliter le rétablissement et favoriser le maintien en emploi :
1. Dans le cas d’un problème de santé psychologique (Guide technique : RG-758) : Guide soutenir le retour au travail et favoriser le maintien en emploi – Faciliter le retour au travail d’un employé à la suite d’une absence liée à un problème de santé psychologique
Vous pouvez télécharger cet outil gratuitement en cliquant ici
- St-Arnaud, L. et Pelletier, M. (4 novembre 2013)
- Outil pratique qui combine l’accompagnement individuel et les changements organisationnels. Inclus des capsules vidéo informatives.
2. Dans le cas d’un trouble musculo-squelettique (Outil d’intervention OMRT-Fr) : Troubles musculo-squelettiques – Guide et outils pour le maintien et le retour au travail
Vous pouvez télécharger cet outil gratuitement en cliquant ici
- Stock, S., Baril, R., Dion-Hubert, C., Lapointe, C., Paquette, S., Sauvage, J., Simoneau, S. et Vaillancourt, C. (2 novembre 2005)
- Guide accompagné d’un ensemble d’outils d’intervention (grilles d’estimation et formulaires) qui vise à soutenir les organisations désirant concevoir et implanter un programme de retour au travail.
POUR CITER CETTE INTERPRÉTATION SCIENTIFIQUE GLOBAL-WATCH
Gouin, M.-M., Hébert, R., St-Hilaire, F., Major, M.-E., Lefebvre, R., Fouquet, E. (2018). Pratiques clés pour un retour au travail réussi et durable. Interprétation scientifique Global-Watch disponible au www.global-watch.com
POUR CITER L’ARTICLE ORIGINAL DES AUTEURS DE L’ÉTUDE
Durand, M.-J., Nastasia, I., Coutu, M.-F., & Bernier, M. (2017). Practices of Return-to-Work Coordinators Working in Large Organizations. Journal of Occupational Rehabilitation, 27(1), 137-147.
Aussi disponible sur global-watch.com
- Trousse d’outils Global-Watch – Le retour au travail après une absence de longue durée
- Le retour au travail après une absence pour des raisons de santé mentales : 3 initiatives
- Retour au travail durable de personnes ayant un trouble mental commun : miser sur les ressources disponibles
- Les défis du retour au travail chez les survivantes du cancer du sein
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- Histoire de cas : Préparer le retour dès le départ : comment Pratt & Whitney Canada accompagne ses employés en invalidité